Une nuit calme dans le désert au nord du Mali a tourné au drame lorsqu'un drone apparemment déployé par l’armée a tiré une munition explosive sur une tente, tuant toute une famille. Cette frappe est un exemple récent des opérations militaires maliennes qui tuent des civils, et pourrait constituer un crime de guerre.
La frappe du 13 novembre, vers 21 h 30, sur le village de Tangatta, dans la région de Tombouctou dans le nord du Mali, a tué sept civils, dont cinq enfants âgés de 7 à 15 ans, issus de la même famille touareg, selon des médias et un témoin interrogé par Human Rights Watch. L'attaque a déplacé tous les autres habitants du village.
Un enseignant de 45 ans qui a survécu à l'attaque m'a raconté au téléphone qu'il avait vu dans le ciel un drone avec une lumière, puis avait entendu une forte explosion. Il a déclaré avoir trouvé les corps des parents et de leurs cinq enfants. « Six des corps étaient carbonisés », a-t-il déclaré. « Le corps du père n'était pas carbonisé, mais présentait des blessures visibles au visage et à la jambe gauche. Nous les avons enterrés dans deux tombes, la mère avec les enfants dans l'une, et le père dans l'autre. »
L'enseignant a déclaré que l'armée malienne faisait voler des drones au-dessus de Tangatta « tous les jours », car le Front de libération de l'Azawad (FLA), une coalition de groupes armés touaregs, et le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM ou Jama'at Nusrat al-Islam wa al-Muslimeen, JNIM), lié à Al-Qaïda, opèrent dans la région. Aucun homme armé n'était toutefois présent au moment de la frappe, a-t-il déclaré.
Les hostilités dans le nord du Mali se sont intensifiées depuis janvier 2023, lorsque les autorités militaires maliennes ont mis fin à un accord de paix conclu en 2015 avec les groupes armés touaregs. Dans le même temps, le GSIM a renforcé son contrôle sur l'ensemble du pays, assiégeant Bamako, la capitale, et coupant l'approvisionnement en carburant.
Cette récente frappe n'est pas un incident isolé. Les forces maliennes ont déjà mené des attaques de drones qui ont fait de nombreuses victimes civiles. Le lendemain de l'incident de Tangatta, une autre frappe de drone dans le village d'Albouhera, non loin de là, aurait tué deux femmes et deux enfants en bas âge.
En vertu du droit de la guerre, les civils ne doivent jamais être pris pour cible. Toutes les parties à un conflit armé doivent prendre toutes les précautions possibles pour éviter de nuire aux civils et aux biens civils. Les violations graves, telles que les attaques qui ne font pas de distinction entre civils et combattants, constituent des crimes de guerre si elles sont commises de manière délibérée ou imprudente.
Les autorités maliennes devraient mener d'urgence une enquête impartiale sur l'attaque de Tangatta et traduire les responsables en justice. Elles devraient rapidement verser une indemnisation adéquate aux proches des victimes, et devraient cesser de mener des frappes de drones illégales.